Pourquoi un collectif ?

Le Collectif de lutte contre le harcèlement à l’Université – le Cha-U – procède d’une initiative de personnels et étudiants·es de l’Université de Lorraine qui, après le suicide en août 2020 d’une doctorante contractuelle, ont décidé d’unir leurs forces pour mettre en place les conditions d’une prise de conscience collective.

Nous estimons qu’il y a urgence à ce que la communauté universitaire dans son ensemble se saisisse du problème du harcèlement dans l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR). Considérant que chaque institution génère des formes de violences spécifiques héritées de son histoire respective et de ses modes de fonctionnements propres, nous voulons engager une réflexion d’ampleur sur la nôtre, au sein de laquelle les rapports de savoir sont aussi des rapports de pouvoir, qui parfois s’ignorent – ou feignent de s’ignorer. « Chahuter » ces rapports de domination, c’est aiguiser notre intelligence de ce qu’ils impliquent et se donner les moyens de les questionner.

Ce que l’on appelle le « harcèlement » – qu’il s’agisse de violences sexistes et sexuelles, de harcèlement moral, de droit de cuissage, d’abus de pouvoir, d’abus de confiance, d’abus de faiblesse, ou de tout cela à la fois – est un phénomène complexe qui recouvre des situations diverses, allant de la maltraitance caractérisée et d’emblée vécue comme telle par la victime, à la relation plus ou moins consentie parce que comportant un ensemble (dissymétriques) de gratifications réciproques. Cette complexité – qui explique le désarroi de tant d’entre nous, témoins de situations ambiguës ou insupportables –, nous souhaitons nous y affronter en nous intéressant plus particulièrement à la relation enseigné·e/enseignant·e (et encadré·e/encadrant·e ) : outre qu’elle échappe en partie au droit du travail qui régit les rapports entre membres du personnel, elle reste un impensé majeur de nos métiers, où les rapports hiérarchiques ne disent pas vraiment leurs noms, où l’autorité intellectuelle se pare d’un prestige renforcé et où les liens de dépendance prennent des formes critiques quand la fascination le dispute au sentiment d’illégitimité et à la vulnérabilité sociale et affective.

Dans cette perspective, le Cha-U se donne trois missions principales :

  • Une mission de recherche pluridisciplinaire consacrée à la spécificité de la question du harcèlement dans l’ESR ;
  • Une mission de veille, d’information et de communication ;
  • Une mission d’écoute, d’orientation et de partage d’expériences.

C’est sur la base du travail fourni par ces trois missions que notre Collectif, indépendant des instances de l’Université, portera auprès de celles-ci des propositions concrètes dans le but non seulement d’éviter de nouveaux drames, mais de participer au renouvellement des modes de relations et de travail dans l’Enseignement Supérieur et la Recherche.

À un moment où la charge de travail à l’Université s’alourdit, il importe que nous partagions la réflexion et la lutte. Il importe aussi que nous soyons représenté·es et identifiables sur tous les sites de l’UL et sur tous les terrains. L’efficacité de notre Collectif dépendra des forces que nous réussirons à rassembler.