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Jugement exemplaire rendu par la section disciplinaire de l’Université de Bourgogne

Rappel des faits : à l’été 2020 une doctorante de l’Université de Lorraine se suicide et laisse un mot dans lequel elle met notamment en cause son directeur de thèse, lequel avait déjà fait l’objet d’alertes. L’UL diligente deux enquêtes internes puis décide de dépayser la procédure et saisit la section disciplinaire de l’université de Bourgogne. Celle-ci vient de rendre son jugement : le directeur de thèse incriminé est mis à la retraite d’office et l’Université de Lorraine doit « afficher dans ses locaux » le jugement anonymisé.

La décision est certes susceptible d’appel mais nous voulons saluer ici son caractère exemplaire : après énumération des reproches faits au directeur de thèse (« comportement fautif envers certaines étudiantes », favorisé par la mise en place d’« un système personnifié » au sein duquel le même directeur « incarnerait toutes les responsabilités clés »), un argumentaire précis et détaillé fonde, sur cinq pages, les motivations du jugement, qui s’appuie sur un « nombre très conséquent » de témoignages concordants et sur les faits établis par les enquêtes internes (nous saluons en particulier le travail du CHSCT).

Le Président de l’UL a fait parvenir le jugement anonymisé aux membres du laboratoire concerné en leur précisant que celui-ci serait affiché dans les locaux de l’UFR où exerçait le collègue, de son laboratoire, ainsi qu’à la Présidence. Le Cha-U s’interroge sur cette communication économe et considère qu’il est crucial que ce jugement, d’intérêt public, soit porté à la connaissance de toutes et tous. La communauté universitaire, que l’on avait informée de l’externalisation de la procédure, mérite de connaître également l’issue de celle-ci. Notre collectif a donc demandé officiellement à la Présidence qu’il soit transmis par mail aux étudiant·es, aux doctorant·es et aux personnels. C’est en effet dans la publicisation de la sanction (qui peut encore être contestée devant le CNESER) que se jouent l’essentiel de sa portée éthique et son pouvoir d’avertissement.

Si le jugement est exemplaire (le Cha-U se propose de l’étudier dans l’un de ses prochains ateliers, tant certains de ses constats pourraient figurer tels quels dans les formations à la prévention contre le harcèlement des doctorant·es et de leurs encadrant·es), la sanction l’est aussi. Il n’en reste pas moins que des questions continuent à se poser, concernant en particulier le barème des sanctions qu’encourent les enseignant·es-chercheur·ses (dans ce cas précis, le directeur de thèse était assez proche de la retraite : quid s’il en avait été plus éloigné ?) et les dysfonctionnements collectifs qui ont permis la pérennisation d’un tel « système personnifié ».