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Un plan d’action annuel (2021-2025) contre les VSS dans l’ESR

En septembre 2021, Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, lance un appel à projets à destination des établissements de l’ESR pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) visant la « consolidation des dispositifs de signalement et d’écoute, l’amélioration des procédures disciplinaires en lien avec les VSS,  la communication et la sensibilisation auprès des communautés des établissements sous la forme d’événements dédiés ». Depuis plusieurs années, le ministère affiche la volonté de s’attaquer à la question. Ainsi, en mars 2018, F. Vidal écrit des violences sexistes et sexuelles qu’elles « constituent une entrave au développement des compétences et des talents » au sein de l’ESR. En mars 2020, le rapport annuel sur le sexisme en France du Haut conseil à l’égalité indique que « le sexisme ambiant qui règne au sein des établissements d’enseignement supérieur est difficile à objectiver car les actes de sexisme et les violences sexuelles sont souvent banalisés et plus difficile à dénoncer dans ces lieux où se joue l’avenir des étudiant.es et où le sentiment d’appartenance et les rites d’intégration sont érigés comme normes indépassables » (p. 69). Le constat portait notamment sur les écoles d’ingénieurs, très fortement masculines, mais c’est tout l’ESR qui est concerné : malgré des actions bien réelles (campagne de sensibilisation, missions nationales ou locales, recommandations), le rapport constate que « le traitement de la question du sexisme ne semble pas à la hauteur des enjeux ». Le rapport IGESR 2021-143 de juillet 2021 a repris ce constat. S’il mentionne le fait que les universités se sont très souvent dotées de cellules de signalement, il souligne la nécessité de construire « une connaissance plus approfondie des VSS au sein de l’enseignement supérieur » (p. 14), notamment en déployant des enquêtes. S’appuyant sur ces études et rapports, et s’inquiétant du nombre en forte hausse de témoignages d’étudiant.es « victimes » de harcèlement, le MESRI a ouvert un ensemble de consultations (conférences d’établissements, associations, syndicats etc.) et a produit ce Plan d’action pluri-annuel, soit 21 mesures classées en quatre axes :

  • un plan de formation et de sensibilisation massif, pour toute la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche ;
  • un renforcement des dispositifs de signalement et de leur fonctionnement ;
  • une communication renforcée : prévenir, se sentir concerné, mieux connaître ;
  • la valorisation de l’engagement des étudiantes et des étudiants, ainsi que des personnels.

De son côté, l’Université de Lorraine, comme d’autres établissements de l’ESR, a commencé à se doter de moyens de lutte et mis en place certains dispositifs : cellule Harcèlement, cellules EDI (Égalité, diversité, inclusion), dispositif HS-discri, sous le pilotage de la Mission Égalité-diversité. Si c’est un début, on sait aussi que ces moyens sont encore insuffisants ; notre université a donc répondu à cet appel à projet. Le Cha-U se propose dans les semaines qui viennent d’étudier les 21 mesures du plan et d’interroger la mission EDI sur sa réponse à l’AAP et les nouvelles dispositions envisagées à l’UL. Nous aurons sans doute aussi des propositions à formuler.

S’il faut reconnaître au niveau des instances institutionnelles de l’ESR une prise de conscience plus importante et une volonté d’agir pour réduire les VSS à l’université, on peut continuer à penser que ces textes et ces actions restent plus curatifs que véritablement préventifs et aptes à faire bouger les lignes. C’est à une véritable compréhension des phénomènes de harcèlement que nous devons nous atteler. Enquêter, comprendre, analyser, transformer les représentations et les habitus, voilà des actions déterminantes à mettre en place pour lutter contre les VSS. Mais on peut s’interroger sur la mise en œuvre par AAP d’un tel programme. Lutter contre les VSS à l’université relève-t-il d’un concours annuel ?  N’aboutirons-nous pas à des catalogues d’actions de court terme, immédiatement évaluables mais dont l’efficacité réelle restera à prouver ? Il est urgent d’agir mais en se donnant les moyens, matériels, humains et intellectuels.